Le diagnostic et la mise au point d'une anomalie cardiaque
Le diagnostic précis d’une malformation cardiaque nécessite la confrontation de l’anamnèse (histoire de l’enfant), de l’examen clinique et de différents examens complémentaires. Ces examens apporteront, en fonction de la malformation, des informations différentes mais indispensables pour préciser l’attitude thérapeutique.
Les moyens diagnostiques sont à l’heure actuelle de plus en plus sophistiqués et de moins en moins invasifs et la tentation est grande pour le praticien de recourir d’emblée à une méthode d’imagerie performante. C’est oublier cependant que chaque méthode a ses propres limitations et que le diagnostic est et doit rester une démarche intellectuelle intégrant les données obtenues par l’interrogatoire (anamnèse) et l’examen de l’enfant à celles obtenues par une ou plusieurs techniques complémentaires choisies en fonction du type de pathologie, de l’âge de l’enfant ou d’autres paramètres : il n’y a pas encore de « technique miracle » qui apporterait la réponse à toutes les questions.
Anamnèse
Lorsque l’enfant est vu pour la première fois mais également les fois suivantes, une ‘anamnèse’ (questionnaire médical) est effectuée afin de préciser le mode de présentation de la maladie, l’évolution, les antécédents de l’enfant ainsi que de la famille proche. Ces informations sont extrêmement importantes. Afin de faciliter l’anamnèse, il est souvent utile, surtout chez le petit enfant, de présenter le carnet de santé au médecin. retour vers "Moyens diagnostiques"
L’examen clinique
Observer et examiner l’enfant est essentiel dans la compréhension de la pathologie sous-jacente. Lors de la consultation ou lors de l’admission en unité de soins, un examen clinique complet est donc toujours effectué afin d’obtenir entre autres les informations suivantes : poids et taille de l’enfant, quelle est la coloration de l’enfant, son comportement, les caractéristiques de la respiration, l’auscultation cardio-pulmonaire, la palpation abdominale, la palpation des pouls fémoraux, la mesure de la tension artérielle, la mesure de la saturation transcutanée en oxygène.
L’examen clinique peut ainsi être déterminant dans certaines pathologies ; par exemple, la palpation du pouls des artères fémorales dans le creux inguinal (« l’aine ») permet d’exclure une coarctation de l’aorte. Tous les pouls artériels sont peu perceptibles dans les situations de choc. La mesure correcte de la tensionartérielle est difficile chez le nourrisson et n’est pas réalisé en routine. Chez le plus grand enfant, c’est aussi aisé que chez l’adulte mais il faut utiliser des manchettes adaptées au périmètre du bras de l’enfant sous peine d’erreur. L’auscultation pulmonaire est utile pour rechercher l’œdème pulmonaire (accumulation de sérosités dans les poumons dans la défaillance cardiaque) ou les surinfections. La palpation de l’abdomen permet d’apprécier le volume du foie, qui augmente dans la défaillance cardiaque. L’auscultation cardiaque est évidemment capitale dans la recherche des anomalies cardiaques, surtout chez le plus grand nourrisson ou enfant.
L’électrocardiogramme (en abrégé ECG ou EKG) est l’enregistrement graphique des ondes électriques générées par le tissu cardiaque. On place pour ce faire des électrodes sur les 4 membres et sur le thorax reliées par des câbles à la machine enregistreuse, l’électrocardiographe. L’examen est non douloureux, mais nécessite que l’enfant soit couché sur le dos et calme pendant quelques secondes. Il est fait quasi systématiquement lors d’une première hospitalisation en unité de soins ou lors des consultations. Le tracé donne d’importantes informations sur le rythme cardiaque, les anomalies de l’épaisseur du muscle ou de la taille du cœur et la circulation coronarienne. Cette technique reste d’importance capitale pour ces aspects. Il faut savoir que la position habituelle des électrodes sur le thorax peut différer chez le petit enfant, surtout s’il y a anomalie de position du cœur dans le thorax.
C’est l’image du thorax et de ses différentes parties (cage thoracique, poumons, vaisseaux pulmonaires, cœur et médiastin) obtenu par technique de rayons X (rayons ionisants). C’est un examen court et indolore, se faisant dans le service de radiologie, ou parfois en unité de soins si nécessaire.
La RX du thorax apporte d’importants renseignements pour le diagnostic : on y voit la silhouette cardiaque, mais surtout les poumons, pour lesquels l’échocardiographie ne donne que peu de renseignements. Or, les pathologies cardiaques ont souvent des répercussions sur la circulation pulmonaire qui n’est visible simplement qu’aux rayons X. Ces perturbations de la circulation pulmonaire sont dans les grandes lignes une exagération ou un appauvrissement de cette circulation ou encore une stagnation du sang dans les veines pulmonaires ou œdème pulmonaire. La radiographie du thorax permet également de dépister la présence d’air (pneumothorax) ou de liquide autour du poumon (épanchement pleural) ou du cœur (épanchement péricardique), des infections pulmonaires (pneumopathies) etc., tous pouvant parfois compliquer l’évolution ou la prise en charge des anomalies cardiaques. La RX du thorax apporte aussi quelques renseignements sur le cœur, mais chez l’enfant, ces renseignements sont moins fiables qu’avec les techniques échographiques. Cette technique par contre est irremplaçable pour visionner les éléments opaques aux rayons X comme les calcifications de prothèse valvulaire, les sondes et les boîtiers de pace maker ou les dispositifs mis en place par cathétérisme interventionnel. Enfin, la radiographie du thorax participe au bilan malformatif général du nourrisson porteur d’une cardiopathie : elle doit donc être réalisée systématiquement au moins une fois. La radiographie du thorax doit être prescrite de façon parcimonieuse car les rayons ionisants sont toxiques à forte dose. retour vers "Moyens diagnostiques"
Echocardiographie transthoracique
C’est la visualisation de la structure et de la fonction du cœur grâce à l’utilisation d’une sonde à ultrasons appliquée sur le thorax et reliée à un ordinateur puissant. La méthode ‘écho bidimensionnelle’ permet une étude très détaillée (surtout chez le petit enfant) de la structure du cœur (parois, valves, artères et veines). L’adjonction du ‘Doppler’ et du ‘Doppler couleur’ permet en plus d’étudier les mouvements du sang, sa direction ainsi que sa vitesse. La qualité de l’information recueillie dépendra cependant de plusieurs choses, comme le poids de l’enfant, l’interférence des poumons, l’expérience de l’opérateur, etc. L’enfant doit être couché sur le dos ou sur le côté gauche et doit rester calme pendant l’examen. L’examen est tout à fait indolore et inoffensif pour l’enfant mais comme il peut durer longtemps (15 à 45 minutes), il nécessite parfois chez le petit enfant (surtout entre 6 mois et 3 ans) une légère sédation (le plus souvent par administration d’un sirop (hydrate de chloral)). Il est effectué par les cardiologues pédiatres en consultation ou dans les unités de soins si nécessaire.
Principes de l’échocardiographie: L’imagerie cardiaque par ultrasons (US) repose sur le principe du sonar, mis au point pour détecter les sous marins pendant la 2ème guerre mondiale : lorsqu’on envoie un faisceau d’US à travers un liquide, les structures rencontrées par ce faisceau renvoient une partie de l’énergie vers l’émetteur sous forme d’échos ; ces derniers sont captés et, connaissant la vitesse de propagation du son dans le milieu, on peut localiser avec précision les structures. La sonde d’échographie cardiaque fonctionne de la même manière : des salves d’US sont émises à travers le thorax entre les côtes et les structures cardiaques rencontrées renvoient des échos qu’un ordinateur très puissant analyse et reproduit sur un écran sous forme d’image du cœur en temps réel. Comme la vitesse du son dans les différentes structures cardiaques et le sang est identique et connue, cette image en temps réel reproduit en outre fidèlement les dimensions cardiaques. Un point important est l’innocuité de la technique : en effet, pour que les US aient un effet délétère sur les cellules, il faut qu’ils soient appliqués en continu avec de hautes énergies. Or, la sonde médicale émettant les US fonctionne pendant un millième de seconde et puis « écoute » les échos pendant 999 millièmes de seconde : pour un examen de 20 minutes, le temps cumulé d’émission des US est de 1,2 secondes, ce qui ne saurait nuire ; cela a d’ailleurs été prouvé biologiquement.
Echocardiographie mono et bidimensionnelle traditionnelle : C’est la technique de base qui permet de mettre en image les malformations cardiaques. L’imagerie monodimensionnelle ou mode Tm (« time-motion ») consiste à réaliser un graphique rapportant la cinétique des structures traversées par un seul rayon du secteur càd le « quartier de tarte » visible sur l’écran de l’écho bidimensionnel (écho 2D). Cette imagerie associée au Doppler spectral, qui permet de mesurer les différentes structures ainsi que les intervalles de temps entre les différents évènements du cycle cardiaque, apporte d’importantes informations sur la fonction cardiaque. L’écho 2D consiste à étudier un plan de coupe de la structure cardiaque. On recourt parfois, pour visualiser certains flux anormaux, à l’échocardiographie de contraste : la technique consiste à injecter dans le flux sanguin une substance plus échogène que les globules rouges et qui délimite plus nettement les cavités cardiovasculaires et visualise les anomalies topographiques des flux sanguin (passage d’une oreillette à l’autre par une communication par exemple). Cette technique est moins utilisée depuis l’avènement du Doppler couleur mais rend encore des services dans des situations spécifiques.
Le Doppler spectral : Lorsqu’on dirige un faisceau d’US à travers le flux sanguin du cœur ou des vaisseaux, chaque globule rouge frappé par les US renvoie un écho dont la fréquence est fonction de sa vitesse (c’est l’effet Doppler des physiciens), positive ou négative selon que le sang se dirige vers la sonde ou s’en éloigne. On peut ainsi enregistrer pendant tout le cycle cardiaque la vitesse du sang à un endroit du cœur ou des vaisseaux, établir le graphique en fonction du temps, le « spectre », de la dispersion des vitesses (Doppler spectral) et en déduire par les lois de l’hydrodynamique, la sévérité des obstacles et les différences de pression.
Le Doppler couleur : On peut appliquer cette analyse Doppler à tous les mouvements sanguins contenus dans une coupe d’écho 2D et par un codage couleur des différences de vitesse, établir en temps réel la carte des vitesses des flux sanguins dans la coupe considérée. De cette manière, d’un seul coup d’œil sur le Doppler couleur, le praticien décèle les anomalies de flux qu’il peut localiser et mesurer en s’aidant du Doppler spectral. Cette technique associée à l’écho 2D a grandement facilité le diagnostic complet des anomalies les plus complexes et constitue encore de nos jours l’examen le plus rentable en cardiologie malformative du nourrisson. En routine, lorsqu’on prescrit un examen échocardiographique, on utilise systématiquement le mode Tm, 2D, le Doppler spectral et le Doppler couleur car les excellentes machines dont on dispose de nos jours combinent toutes ces fonctions. Notons qu’il est désormais possible à l’aide de sondes spéciales de procéder à une analyse tridimensionnelle du Doppler couleur, améliorant de cette manière la résolution spatiale et la quantification des flux anormaux complexes.
Echocardiographie tridimensionnelle : Si on observe simultanément plusieurs plans de coupe et qu’on les amalgame, on obtient une image « en trois dimensions » càd « en relief ». Cette technique est très prometteuse pour l’étude des structures complexes, où la reconstruction mentale du volume à partir des différents plans 2D est difficile. Les progrès incessants des performances de l’informatique autorise actuellement la fabrication de sondes qui donnent une analyse tridimensionnelle « on line », càd en temps réel.
Le Doppler tissulaire : La technologie utilisée pour l’analyse des flux sanguins par le Doppler couleur peut désormais être appliquée au muscle cardiaque qui est également une structure en mouvement (systole, diastole…). Or les mouvements du muscle sont déterminés par ses qualités intrinsèques : par exemple, une région musculaire victime d’un infarctus ne se contracte plus ou se meut d’une manière différente des régions voisines. De même, le remplissage des ventricules pendant la diastole est fonction des qualités de relaxation du myocarde. Désormais, la nature même du muscle cardiaque et ses capacités dynamiques sont analysables en détail par une technique non invasive. On comprend l’intérêt de la technique en cardiologie de l’adulte, dominée par les atteintes du muscle cardiaque d’origine coronarienne. Les applications pédiatriques ne manquent pas non plus, surtout pour les maladies du myocarde, la surveillance des cœurs transplantés et pendant la période postopératoire, lorsque le myocarde peut présenter diverses complications transitoires. retour vers "Moyens diagnostiques"
L’échocardiographie transoesophagienne
Lorsqu’on s’adresse à de plus grands enfants ou aux adultes, la région postérieure du cœur n’est pas toujours bien visible avec l’échographie transthoracique. On peut alors recourir à l’échographie transoesophagienne (ETO). La technique est totalement identique à l’écho transthoracique, mais la sonde est installée à l’extrémité d’un tube de gastroscopie et localisée dans l’œsophage, immédiatement derrière le massif cardiaque. Cet examen assez désagréable de part l’introduction de la sonde dans l’œsophage, est généralement réalisée sous anesthésie générale chez l’enfant et sous sédation chez l’adulte.
Cet examen est également utilisé de façon très fréquente en salle de cathétérisme pour guider les procédures interventionnelles. En salle d’opération elle permet, alors que le patient est déjà sous narcose, d’illustrer le diagnostic devant l’équipe chirurgicale. L’examen peut par ailleurs se poursuivre sans entrave pendant l’ouverture du thorax. L’ETO permet également en fin d’intervention de vérifier les résultats et d’ajuster le traitement « dans la foulée » si besoin est. L’ETO a été pour beaucoup dans la construction de l’esprit d’équipe entre cardiologues et chirurgiens ; elle a contribué d’une certaine manière à l’amélioration des résultats thérapeutiques. Enfin, lorsque le nourrisson intubé et sous sédation présente des complications postopératoires immédiates aux soins intensifs, l’ETO permet d’explorer le cœur en détail sans interférer avec la cicatrice thoracique. Signalons ici que la miniaturisation des techniques autorise la fabrication de sondes d’échographie œsophagienne compatibles avec la taille de l’œsophage d’un petit enfant. retour vers "Moyens diagnostiques"
Holter ECG, Holter TA
Dans certaines circonstances, il est utile de connaître les fluctuations de la pression artérielle pendant 24 heures. On utilise alors un monitoring ambulatoire ou Holter tensionnel: la manchette de mesure de tension artérielle est laissée en place pendant 24 heures et les mesures sont stockées dans un enregistreur portable et lues sur un ordinateur à la fin de la période d’enregistrement.
De la même façon il est souvent utile de connaitre les fluctuations de rythme cardiaque pendant 24 heures. En effet, les troubles du rythme cardiaque sont rarement permanents et il faut plutôt de la chance pour les capter à l’occasion d’un simple ECG. On utilise dans ce cas, le Holter ECG. Le principe est exactement le même que celui de l’ECG en se limitant aux électrodes thoraciques. Les électrodes sont reliées à un enregistreur portable qui peut être lue à la fin de l’enregistrement. Pour les anomalies plus rares du rythme, il existe des dispositifs susceptibles d’enregistrer pendant une semaine ou plus les évènements anormaux.
Ces examens ne nécessitent pas l’hospitalisation de l’enfant. Il peut rentrer à domicile avec l’appareillage et avoir une activité normale (hormis bain, douche et piscine pour le Holter).
Enfin, on dispose maintenant de dispositifs implantables (sous-cutané et sans entrave extérieure) qu’on peut laisser plusieurs semaines ou mois en place (un peu comme on laisse en place un boitier de pace maker) et dont l’analyse du contenu peut expliquer des malaises survenant très sporadiquement. Ces techniques diagnostiques sont rarement appliquées en pédiatrie et sont réservées en général aux patients plus âgés présentant tardivement des séquelles après cure chirurgicale d’une malformation complexe. retour vers "Moyens diagnostiques"
Epreuve d’effort
Cet examen consiste à enregistrer l’adaptation du cœur à l’effort en mesurant l’activité électrique du cœur (ECG), la tension artérielle (brassard) et parfois les échanges gazeux (embout buccal) pendant l’effort. L’épreuve d’effort calibrée ne s’adresse pas au nourrisson mais bien sûr à l’enfant capable de fournir un effort soutenu sur commande. Il est rare que cette méthode puisse être appliquée avant l’âge de 6 ans et il faut 8 à 10 ans pour obtenir une collaboration sans trop de failles. Cette technique ne s’adresse donc pas au diagnostic précoce des anomalies cardiaques, mais bien davantage à l’étude de l’adaptation à l’effort ou au diagnostic des complications tardives chez les enfants opérés. La technique s’applique aussi bien entendu chez les enfants sportifs sans antécédents cardiaques, mais ce n’est pas le propos du présent ouvrage. En principe, l’épreuve d’effort est sans danger, sauf dans de très rares pathologies. Dans ces cas, elle est réalisée en connaissance de cause avec l’assentiment éclairé des parents. Ces épreuves d’effort réalisées chez l’enfant qui a des plaintes doivent être effectuées sous strict contrôle médical et il est indispensable que le médecin soit assisté d’une infirmière spécialement formée. C’est pour parer aux incidents dans ces cas particuliers que la salle doit être équipée d’un matériel de réanimation de base adapté à tous les âges, puisque cette salle sera utilisée également pour tester les adultes porteurs de pathologie congénitale résiduelle ou séquellaire.
La salle d’effort comporte 4 composants de base : 1) un ergomètre, càd un appareil adaptable aux différentes tailles sur lequel l’enfant peut produire un effort musculaire mesurable sans danger de chute; il s’agit soit d’un vélo fixe (ressemblant à un vélo d’appartement) soit d’un tapis roulant inclinable et spécialement équipé sur lequel l’enfant peut courir à des vitesses et sur des pentes variables. 2) un enregistrement de l’électrocardiogramme à l’aide d’électrodes collées sur la poitrine 3) Un dispositif de mesure de la mécanique ventilatoire et des échanges gazeux, càd une analyse de l’oxygène (et d’autres gaz) inspiré et expiré par l’enfant à l’aide d’une pièce buccale similaire à celle utilisée dans la plongée sous-marine. 4) un monitoring de la pression artérielle. L’ensemble des paramètres est recueilli par un ordinateur qui est muni de programmes d’interprétation sophistiqués permettant d’analyser quantitativement et qualitativement les données en fonction de l’intensité de l’effort fourni. On peut ensuite en déduire si la limitation à l’effort est due à une insuffisance de la pompe cardiaque, à un trouble du rythme, à un simple manque d’entraînement ou encore à des troubles respiratoires organiques (asthme par exemple) ou fonctionnels (hyperpnée par exemple). Placée dans des mains expertes, cette technologie apporte d’importants renseignements à condition d’y apporter beaucoup de soins et d’expérience. retour vers "Moyens diagnostiques"
Le cathétérisme cardiaque diagnostique
Jusqu’à l’invention de l’échocardiographie performante (année 1980), la seule technique disponible pour établir un diagnostic précis exploitable par le chirurgien était le cathétérisme cardiaque (KT). Cette technique permet par l’introduction de sondes à l’intérieur des différentes parties du cœur d’analyser le cœur. Cet examen est effectué par les cardiologues pédiatres sous monitoring radioscopique dans une salle spécialement équipée pour l’enfant. Cet examen se fait en général sous anesthésie générale ou parfois sous sédation chez le grand enfant ou l’adulte. L’enfant doit donc être à jeun. Une fois l’enfant endormi, une petite canule (‘introducteur’) est introduite dans l’artère et/ou la veine fémorale (au niveau du pli de l’aine) ou parfois dans d’autres vaisseaux. Ces petites canules qui resteront en place pendant tout l’examen permettent d’introduire différentes sondes en fonction des analyses nécessaires et de l’anatomie du cœur. Ces sondes ou cathéters (d’où le terme « cathétérisme ») sont de plus en plus performants et il est relativement facile de les loger à l’endroit désiré en les manipulant à partir de leurs points d’entrée dans le système vasculaire. Ces cathéters sont des tuyaux contenant un liquide physiologique qui, reliés à des manomètres, permettent de mesurer les pressions dans le cœur et les vaisseaux (« étude hémodynamique »). Par ces tuyaux, on peut prélever du sang pour mesurer le taux d’oxygène dans les différentes parties du cœur (« oxymétrie »). On peut également injecter un produit de contraste opaque aux rayons X qui réalise un moule des cavités cardiaques et des vaisseaux ; les images radioscopiques de cette injection réalisent l’angiocardiographie qui est filmée par radiocinéma, soit en simple incidence, soit en double incidence, selon l’équipement disponible : les salles les plus performantes sont en effet munies d’un double équipement de radioscopie orientable tous azimuts.
L'introducteur
Introducteur introduit dans la veine fémorale
Quelques exemples de cathéter
A la fin de l’examen, les cathéters sont retirés. Il n’y a pas d’abord chirurgical du vaisseau et donc pas de points de suture. La durée de l’examen est extrêmement variable en fonction de la malformation et des informations recherchées (de 1 à plusieurs heures). L’enfant est ensuite surveillé pendant au moins une heure en salle de réveil (en cas d’anesthésie générale) avant de retourner dans son unité de soins où il pourra être réalimenté progressivement. Il devra toutefois rester couché pendant quelques heures afin d’éviter que les points de ponction ne saignent. L’enfant ne ressentira aucune douleur après le cathétérisme, tout au plus une gêne (comme un ‘bleu’) au point de ponction.
L’échocardiographie donnant aujourd’hui la plus grande partie de l’information nécessaire avant traitement, le KT se limite actuellement aux situations où certaines questions anatomiques restent sans réponse, aux cas ou une étude hémodynamique poussée est nécessaire avant traitement (cathétérisme diagnostique). Lorsqu'un traitement par cathétérisme cardiaque est envisagé on parle de cathétérisme interventionnel (voir chapitre des traitements). Le KT est utilisé chez l’adulte, en routine dirions-nous, pour mettre en image les artères coronaires et le traiter si nécessaire. Cette coronarographie a aussi des applications en cardiologie de l’enfant, mais les indications sont beaucoup moins fréquentes qu’en pathologie adulte. Le KT est également utilisé pour effectuer les mises au point électrophysiologiques lors de troubles complexes du rythme cardiaque : des sondes munies d’électrodes sont introduites dans le cœur où elles captent les différences de potentiel du tissu de conduction (tissu spécialisé générant et transmettant les impulsions électriques responsables de la stimulation du myocarde). Ces informations sont transmises à un enregistreur de type électrocardiographique et leur analyse permet de caractériser les anomalies du rythme observées et d’établir le traitement adéquat, parfois interventionnel.
Le KT diagnostique comporte des contraintes et désavantages qui vous seront expliqués en détail par votre cardiologue pédiatre traitant. Parmi les principaux inconvénients citions la nécessité d’endormir le nourrisson ou l’enfant (ponction des vaisseaux, nécessité d’une immobilité totale de longue durée) et donc d’une collaboration indispensable avec le service d’anesthésiologie. L’irradiation par les rayons X est proportionnelle à la durée de l’examen et donc à la complexité de la malformation. Soulignons que si les progrès considérables de la technologie radiologique ont permis de réduire considérablement les doses de rayons X en améliorant fortement la qualité des images, l’irradiation reste un souci pour le pédiatre. Le KT nécessite également une courte hospitalisation (en général une nuit avant l’acte et une nuit après) pour mise au point avant anesthésie et surveillance postprocédurale. Les complications internes du KT diagnostique sont devenues rarissimes avec le matériel moderne et elles sont généralement transitoires et sans conséquences (troubles du rythme, épanchement péricardique…). Le seul point réellement négatif concerne le traumatisme encouru par les vaisseaux périphériques qui reçoivent les sondes : chez le très petit enfant ou l’enfant en mauvais état hémodynamique, la mise en place d’introducteurs dans la veine ou artère fémorale peut provoquer des lésions de l’endothélium (couche cellulaire bordant la lumière du vaisseau) entraînant ultérieurement une thrombose (oblitération du vaisseau par coagulation du sang) qui peut nécessiter un traitement afin d’essayer de dissoudre la thrombose et ainsi d’éviter des troubles circulatoires ultérieurs. retour vers "Moyens diagnostiques"
La scintigraphie isotopique
Les techniques d’imagerie par radio-isotopes ne sont pas couramment utilisées en cardiologie pédiatrique. Elles peuvent cependant contribuer valablement au diagnostic dans certains cas.
La scintigraphie pulmonaire ventilation/perfusion: les cardiopathies peuvent avoir des conséquences pulmonaires sérieuses qu’il est important de mettre en évidence. En dehors de la technique invasive qu’est le cathétérisme cardiaque avec angiographie sélective, il existe une technique peu invasive qui peut s’effectuer en ambulatoire et donne de précieux renseignements : c’est le scinti-scanning de perfusion pulmonaire. La technique consiste à injecter en intraveineux des agrégats d’albumine marqués avec un isotope (technétium 99) : ces particules radioactives se distribuent dans la circulation pulmonaire et sont arrêtées dans la circulation capillaire en raison de leur volume. On réalise ensuite une « prise de vue » avec une caméra à scintillation et on obtient une image fidèle de la distribution vasculaire pulmonaire et des anomalies éventuelles. Cette technique est souvent couplée avec un scinti-scanning de ventilation pulmonaire. Ce dernier est obtenu avec la même caméra à scintillation, après que le patient a inhalé de l’air contenant un gaz radioactif (Xénon 133) : on obtient ainsi une image de la distribution des voies aériennes dans les poumons. La comparaison des deux images permet de distinguer la part circulatoire de la part ventilatoire des anomalies observées. La scintigraphie myocardique : L’intégrité de la perfusion du cœur par les artères coronaires (perfusion coronarienne) est évidemment vitale pour le myocarde et il est nécessaire de l’évaluer dans certaines situations malformatives ou dans certaines pathologies acquises. En dehors de la coronarographie, il existe une technique peu invasive qui peut s’avérer utile chez le plus grand enfant : la scintigraphie myocardique. Le principe consiste à injecter en intraveineux du technétium 99 lié à un composé complexe (en abrégé : sestaMIBI) qui est capté très spécifiquement par le myocarde où il reste stable quelques heures. Le passage sous la caméra à scintillation sous diverses incidences donne des images assez complètes de la perfusion myocardique au repos dans les différents segments du myocarde. Le même test est reproduit à l’effort ou sous perfusion de drogues provoquant une réponse cardiaque similaire à celle d’un effort et les images sont comparées à celles obtenues au repos pour déceler les régions anormalement perfusées du myocarde.
D’autres techniques isotopiques sont plus rarement utilisées, comme l’injection de globules blancs marqués pour déceler les foyers infectieux par exemple en cas de suspicion d’endocardite infectieuse, ou l’injection de globules rouges marqués pour localiser la rate dans les anomalies de positionnement des viscères et d’anomalies complexes du cœur qui peuvent s’accompagner de polysplénie (plusieurs rates) ou d’asplénie (absence de rate). retour vers "Moyens diagnostiques"
Scanner thoracique
Le développement récent des techniques du scanner constitue pour les cardiologues un nouvel outil diagnostique d’une précision anatomique remarquable. Rappelons que le principe du scanner est d’obtenir par radiographie des coupes du corps humain (tomographie) qui sont reproduites sous forme d’image par traitement informatique, donc à l’aide d’un ordinateur. D’où le premier nom de « CT scan » pour « computed tomography » ou tomographie computérisée. Ces scanners sont de plus en plus performants et il en existe plusieurs générations. Le ‘multislice’ ou ‘scanner à multibarrettes’ est la génération la plus récente, appelée à concurrencer les autres techniques pour la mise au point anatomique tridimensionnelle des structures du thorax. C’est ainsi que les vaisseaux du cœur (aorte et artères pulmonaires) peuvent être étudiés en grand détail par cette technique. Les structures dans le cœur (valves, parois..) sont non ou difficilement analysables par cette technique en raison de leurs mouvements incessants.
Cet appareil utilise les rayons X et un examen correspond à une irradiation équivalente à 50 radiographies du thorax (à l’heure actuelle car de nouvelles applications vont permettre de diminuer cette dose). Il faut donc limiter le nombre d’examens au strict minimum nécessaire. Le principe consiste à faire tourner autour du patient un volumineux anneau portant sur sa circonférence interne une source de rayons X et (selon les modèles et les applications) 16 à 64 barrettes de détecteurs de Rayons X. Comme la table du patient se déplace longitudinalement, on peut en très peu de temps et en additionnant de nombreuses coupes successives accumuler une myriade d’informations radiologiques sur le volume corporel exploré.
Les progrès de cette technique sont très rapides et le temps de rotation, la résolution des images, l’épaisseur des coupes et les doses de rayons X sont en constante amélioration. Bien évidemment, ces myriades d’informations ne sont exploitables que grâce aux performances de l’informatique moderne qui trie toutes les données en fonction de la profondeur et du contraste et reconstitue une image 3D très fidèle de l’anatomie explorée. Grâce à un codage couleur, on peut même reconstruire des images dignes des traités d’anatomie les mieux illustrés. Enfin, comme la machine capte un volume, les images 3D sont visibles sous toutes les incidences, un peu comme un hologramme : l’image projetée sur l’écran du PC peut être animée de rotation axiale ou transversale, permettant d’un seul coup d’œil la perception de toutes les particularités anatomiques. Les images saisissantes de précision obtenues à ce niveau par les scanner de dernière génération nous permettent d’espérer que l’indication de l’angiographie sélective technique invasive à la fois par son abord et la quantité de produit de contraste nécessaire, sera dans un proche avenir réduite au minimum. Comme les images sont acquises en très peu de temps, l’anesthésie de l’enfant n’est souvent pas nécessaire.
Cette technique remarquable est basé sur le principe est de captation de l’énergie émise par l’hydrogène (protons) des cellules lorsqu’il cesse d’être soumis à des variations du champ électromagnétique. Les tissus sont différentiés en fonction de leur concentration en hydrogène et leur situation dans l’espace est déterminée en fonction des angles d’orientation spatiale. La RMN enregistre donc pendant un certain temps tout un volume anatomique, y compris les évènements dynamiques qui s’y passent. Grâce à un programme informatique savant et un ordinateur particulièrement puissant, on parvient ainsi à reconstruire une image tridimensionnelle de toute l’anatomie. Les progrès sont tels qu’on peut désormais reproduire l’anatomie des cibles ( le cœur par exemple) en temps réel, donc sans avoir besoin de reconstruire l’image, ce qui nous donne l’équivalent d’un amalgame entre échocardiographie et angiographie et donc une combinaison de l’anatomie cardiovasculaire et du fonctionnement hémodynamique, et ce en trois dimensions… La RMN est devenue la technique d’examen cardiaque la plus efficiente pour l’anatomie des vaisseaux du cœur et du thorax, mais également de certaines parties du cœur comme le ventricule droit par exemple, surtout chez les grands enfants et adolescents, chez qui est moindre le rendement de l’échocardiographie. Sa capacité d’analyse et de mesure des flux sanguins fournit également des données hémodynamiques intéressantes. La reconstruction tri-dimensionnelle visible sous toutes les incidences imaginables offre au chirurgien une image quasi anatomo-pathologique des lésions, ce qui assure le diagnostic et permet d’adopter sans hésitation la stratégie la plus adéquate. La technique a aussi des limitations : le patient doit être introduit pendant un certain temps dans un aimant ayant la forme d’un tunnel étroit. Le patient doit être immobile, ce qui impose une sédation ou anesthésie chez les nourrissons et petits enfants. L’appareillage énorme est fixe et ne peut se déplacer au chevet des nourrissons malades. Les examens et leur déchiffrage prennent un temps certain et le nombre d’examens réalisables par jour est limité, d’autant que la technique est utilisée pour l’imagerie de l’ensemble du corps et que le nombre de machines disponibles est strictement limité par la loi. La présence d’objets métalliques dans le corps contrindique l’examen par ce procédé (prothèse valvulaire, pacemaker, prothèse articulaire, etc…). Enfin et surtout, la RMN demande un investissement considérable du radiologue et du cardiologue car elle exige la combinaison d’une solide formation en RMN et d’une expérience en profondeur de la cardiologie au sens large pour obtenir des informations fiables, débarrassées d’artefacts et utilisables par le clinicien.
Cette technologie ne cesse de progresser cependant et il existe maintenant des prototypes de salle de cathétérisme sous RMN ; il n’est donc pas interdit de penser que l’on pourra cathétériser sans rayons X dans un avenir raisonnable, fait d’autant plus intéressant que la RMN permet également la mesure des flux sanguins et donc de certains évènements hémodynamiques. Enfin, les appareils deviennent de moins en moins encombrants et ils devraient bientôt gagner en mobilité.
Le diagnostic prénatal : échocardiographie fœtale :
Quand fait-on des échographies pendant la grossesse?
Grâce aux développements récents des techniques d’échographie, il est maintenant possible de voir le cœur du fœtus bien avant la naissance. En général, les obstétriciens proposent 3 échographies durant les grossesses non compliquées. La première échographie permet de confirmer la grossesse, de voir que le fœtus se développe dans l’utérus et de déterminer le terme de la grossesse. A ce stade, les battements du cœur sont visibles mais l’anatomie du cœur ne peut pas être précisée. La deuxième échographie, réalisée en général en milieu de grossesse est souvent appelée l’échographie morphologique’. A ce stade, il est possible de voir la plupart des organes du fœtus dont le cœur. La dernière échographie, réalisée en fin de grossesse, permet de suivre la croissance du fœtus et sa position avant la naissance. Que fait l’obstétricien en cas de suspicion de malformation ?
Lors de l’échographie morphologique, les obstétriciens vont entre autre regarder le cœur du fœtus et en cas de suspicion d’une malformation cardiaque, ils vous proposeront de rencontrer un cardiologue pédiatre spécialisé dans l’échographie cardiaque prénatale. Ce médecin fera souvent une nouvelle échographie afin de préciser au mieux l’anatomie du cœur. Il pourra ensuite vous expliquer le type de malformation cardiaque, les conséquences et la prise en charge. Souvent plusieurs échographies seront réalisées pendant la grossesse pour vérifier l’évolution de la malformation cardiaque et la croissance du fœtus. En cas de diagnostic d’une malformation cardiaque avant la naissance, les médecins proposeront souvent de réaliser une ponction amniotique (c’est à dire de piquer dans le ventre de la maman afin de prélever un peu de liquide qui entoure le fœtus) pour vérifier les chromosomes. Faut-il faire une échocardiographie fœtale détaillée lorsqu’on a déjà un enfant cardiaque ?
Les adultes porteurs d’une malformation cardiaque ou les couples ayant déjà un enfant né avec une malformation cardiaque ont un peu plus de risque d’avoir un autre enfant avec une cardiopathie. Ce risque reste malgré tout faible et il y a beaucoup plus de chance que tout se passe bien. Dans ces situations, on peut proposer une échographie cardiaque fœtale systématique qui, en général, permettra de rassurer quant au développement normal du cœur. Est-ce que le médecin peut tout voir?
Il est important de se rendre compte que l’échographie ne permet pas de tout voir. Le cœur d’un fœtus en milieu de grossesse est aussi petit qu’un raisin et il n’est pas toujours facile de voir correctement à travers le ventre de la maman, le placenta et parfois le dos du fœtus! Malgré tout cela, si l’échographie est faite dans de bonnes conditions (ce qui nécessite souvent beaucoup de temps), et par un médecin spécialisé en diagnostic cardiaque anténatal, beaucoup de malformations peuvent être dépistés. Cependant, les malformations sont parfois très complexes et associent parfois plusieurs anomalies qui ne sont pas toujours toutes visibles. L’association de ces différentes anomalies peut changer la prise en charge et le pronostic à la naissance. Certaines malformations peuvent par ailleurs encore évoluer pendant la grossesse et parfois il sera nécessaire de répéter plusieurs fois l’examen. Certaines malformations, même dans de bonnes conditions, restent toutefois extrêmement difficiles à voir avant la naissance.