8. Les retours veineux pulmonaires anormaux
Description
En cas de retour veineux pulmonaire anormal (RVPA) total, les 4 veines pulmonaires, qui normalement s’abouchent sur l’oreillette gauche, s’abouchent anormalement, souvent via un collecteur commun, soit sur l’oreillette droite, soit sur les veines caves. (Figure 1)
Le trajet anormal des veines ou du collecteur peut être associé à un obstacle à ce niveau, mettant en péril la bonne circulation du sang. Les 4 veines pulmonaires peuvent également s’aboucher individuellement (sans collecteur) sur le côté droit.
Figure 1 : les 4 veines pulmonaires (VP) drainent sur un collecteur qui via une veine ascendante s'abouche sur la veine innominée (VI), qui elle même se jette dans la veine cave supérieure (VCS)
En cas de retour veineux pulmonaire partiel, une ou 2 veines pulmonaires drainent de façon anormale sur une veine cave ou sur l’oreillette droite. Cette malformation est souvent mais pas nécessairement associée à une communication interauriculaire (CIA type sinus venosus). (Figure 2)
Figure 2 : retour veineux pulmonaire partiel associé à une CIA de type sinus venosus (flèche)
Les anomalies du retour veineux pulmonaire sont rares pour les formes totales mais plus fréquents pour les formes partielles. Elles peuvent s’associer à d’autres malformations cardiaques, parfois complexes. Nous n’aborderons dans ce chapitre que les malformations isolées.
Présentation clinique
En cas de RVPA total, la présentation est très différente selon la présence ou non d’un obstacle sur le collecteur ou sur les veines pulmonaires. En présence d’un obstacle, la présentation est souvent très sévère. Rapidement après la naissance, l’enfant présente une cyanose intense et un choc cardiogénique mettant sa vie en danger. En l'absence d’un obstacle, la présentation est beaucoup plus lente, marquée au bout de quelques semaines de vie par un tableau de défaillance cardiaque modérée avec polypnée, difficultés d’alimentation et de croissance. La cyanose y est souvent peu sévère malgré le mélange complet du sang bleu et rouge. En général, il n’y a pas de souffle audible.
En cas de RVPA partiel, la symptomatologie est peu marqué voir même absente et tout à fait superposable à celle d’une communication interauriculaire.
Diagnostic
Le diagnostic du RVPA est très difficile avant la naissance (échocardiographie fœtale). Comme pour les autres malformations, il est capital qu’un médecin expérimenté en échocardiographie fœtale exclue, dans la mesure du possible, des malformations cardiaques et non cardiaques associées importantes, car ceci peut profondément changer la prise en charge et le pronostic. En cas de diagnostic anténatal de RVPA total, il est indispensable que l’enfant naisse dans un centre qui dispose d’une équipe médico-chirurgicale cardiologique pédiatrique. En cas de RVPA partiel, ceci n’est pas nécessaire mais il préférable que l’enfant soit examiné après quelques semaines de vie par un cardiologue pédiatre pour évaluer l’importance de ce RVPA et guider les parents dans la prise en charge.
Le diagnostic est le plus souvent fait après la naissance. L’échocardiographie permet le plus souvent un diagnostic très complet de la cardiopathie. Un électrocardiogramme et une radiographie du thorax font en général partie du bilan initial. En cas de RVPA partiel, un cathétérisme cardiaque ou une résonance magnétique sont parfois nécessaire pour bien localiser le trajet anormal.
Prise en charge
Le RVPA total avec obstacle sur le collecteur représente la plus grande urgence chirurgicale néonatale en cardiologie pédiatrique. En effet, aucun traitement médical ou par cathétérisme permet d’améliorer l’enfant, par ailleurs souvent très malade et dont la vie peut être menacée. Il faut donc le plus rapidement possible amener l’enfant en salle d’opération où le chirurgien libère le collecteur et l’abouche sur l’oreillette gauche. C’est une chirurgie à cœur ouvert, nécessitant la mise en place d’une circulation extracorporelle pendant l’intervention.
En cas de RVPA total avec collecteur mais sans obstacle, l’opération peut être faite ‘hors urgence’ mais la technique chirurgicale est la même. En cas d’abouchement séparé des 4 veines (pas de collecteur), la réparation chirurgicale peut s’avérer beaucoup plus difficile et le résultat beaucoup plus aléatoire
En cas de RVPA partiel, l’intervention est proposée si le drainage anormal entraine une surcharge du ventricule droit (dilatation) visible à l’échocardiographie. Le chirurgien, reconnecte d’une façon ou d’une autre la veine anormale sur l’oreillette, parfois sans nécessité de circulation extracorporelle pendant l’intervention.
Le pronostic du RVPA total avec obstacle sur le collecteur est essentiellement lié à la phase aigue. Si une intervention chirurgicale peut être réalisée rapidement en dans de bonnes conditions, le pronostic est en général bon. Si la prise en charge est tardive, la mortalité peut malheureusement s’élever de façon importante. Pour le RVPA total sans obstacle, opéré ‘hors urgence’ la mortalité opératoire est faible et les résultats très bons. Cependant, le pronostic à moyen terme dépend également de la taille du collecteur. En cas d’absence de collecteur de bonne taille, ou en cas d’abouchement séparé des 4 veines, le risque d’obstacle persistant ou récurrent des veines pulmonaires après chirurgie est réel. Ceci peut rendre la prise en charge ultérieure difficile et engraver le pronostic vital.
Le pronostic du RVPA partiel est excellent après correction chirurgicale.
La pratique du sport est autorisée chez la majorité des patients, en absence d’obstacle résiduel sur les veines pulmonaires. De même, pour les patientes à l’âge adulte, des grossesses peuvent être envisagées en l’absence d’obstacle résiduel. Un suivi cardiovasculaire régulier reste par ailleurs recommandé dans tous les cas.
Pour plus d'informations sur les traitements : voir le chapitre "TRAITEMENT des CARDIOPATHIES"